Le statut du marchand de presse

C'est le contrat dépositaire-diffuseur qui définit à la fois le statut juridique du diffuseur, celui de commissionnaire ducroire - statut identique à celui du dépositaire vis-à-vis des messageries - ainsi que les règles de base s'appliquant à la distribution de la presse et à la relation commerciale entre le dépositaire et le diffuseur.

Un statut spécifique

Le contrat dépositaire-diffuseur a été approuvé par le Conseil supérieur comme étant conforme à la loi Bichet (en cours de réforme en 2019). Il a été cosigné par tous les représentants du système de distribution. S'il a été beaucoup amendé par des accords interprofessionnels successifs, ses principes fondamentaux restent valables.

Le contrat est conclu à "titre gratuit, personnel et révocable ad nutum" :

gratuit : le diffuseur n'achète ni ne vend, stricto sensu, son droit d'exercice de la vente de la presse. Mais l'activité commerciale liée à la diffusion de la presse constitue l'un des éléments incorporels de la valeur patrimoniale du magasin de presse, qu'il convient d'intégrer dans la valeur du fonds de commerce.

personnel : la vente de la presse est concédée par la Commission d'organisation de la vente (COV) au futur titulaire, à titre personnel. Ce caractère personnel s'applique aussi si le diffuseur décide d'exercer son activité sous forme de société. Le titulaire du contrat doit être le dirigeant de la société. De même pour la mise en gérance : le gérant doit recevoir l'agrément en tant que diffuseur et être inscrit en nom propre au fichier du Conseil supérieur. Le caractère personnel de l'agrément implique que le diffuseur ne peut transmettre cette responsabilité sans agrément préalable.

révocable ad nutum : ce terme insiste sur le caractère précaire de la situation de l'agent de la vente (à l'image de la situation du dépositaire vis-à-vis des sociétés de messagerie). Le contrat est révocable "au gré des deux parties", suivant des procédures précises et à certaines conditions (articles 3 et 10 du contrat). Ainsi, le contrat ne peut être résilié ou suspendu sans motif par le dépositaire, toute résiliation ou suspension pouvant donner lieu à une indemnité. Le texte stipule que "la suspension du contrat consécutive à une faute professionnelle grave n'ouvre pas droit à une indemnité". Pour éviter "toute situation arbitraire", le diffuseur peut "soit personnellement, soit par l'intermédiaire de son organisation professionnelle, présenter ses observations" au dépositaire, "dans un délai de 48 heures à partir de la notification". À défaut de solution, le litige peut être porté devant la Commission nationale d'arbitrage (article 11). Tout manquement par un diffuseur à ses obligations l'expose aux sanctions relatives à l'abus de confiance (article 408 du code pénal). Cinq éléments doivent être réunis : la remise précaire des fournitures en vertu d'un contrat, l'objet du délit, la dissipation ou le détournement d'une chose appartenant à autrui, l'intention frauduleuse et l'existence d'un préjudice.

Un régime fiscal particulier

Le document "Situation fiscale des agents de la vente de la presse" apporte des précisions sur neuf points précis.

1. Le statut des agents de la vente de la presse, celui de commissionnaire (et non d'acheteur-vendeur). La distribution et la vente des journaux et publications sont réalisées en France par un réseau d'agents de la vente ayant la qualité de commissionnaires, rémunérés à ce titre par une commission ad valorem, c'est-à-dire proportionnelle au montant des ventes de presse qu'ils effectuent.
Recevant la presse en dépôt, ils n'en sont donc pas propriétaires, et leur statut n'est donc pas celui, habituel en matière commerciale, d'acheteur-vendeur.
En procédant aux opérations commerciales nécessaires à la vente, ils exécutent un contrat de commission qu'ils ont conclu, quelquefois tacitement, mais plus généralement par écrit, soit directement avec les éditeurs, soit avec un tiers mandaté par les éditeurs (par exemple, un dépositaire).

2. Le chiffre d'affaires des agents de la vente de presse est constitué par les commissions sur les ventes de presse (et non sur le chiffre d'affaire “fort”), les taux maxima étant fixés par décret ministériel. Le montant des commissions est porté en ressources du compte d'exploitation pour sa valeur nette, c'est-à-dire déduction faite des commissions rétrocédées aux commissionnaires éventuels de l'agent de la vente concerné (comme, par exemple, les porteurs de presse quotidienne approvisionnés par un diffuseur).

3. L'imposition des agents de la vente aux bénéfices industriels et commerciaux. Les agents de la vente sont imposables d'après l'un ou l'autre des régimes d'imposition prévus par la loi (forfait, régime simplifié d'imposition, régime du bénéfice réel), en fonction du montant de leur chiffre d'affaires annuel et de la nature de leur activité.
Pour déterminer le régime d'imposition applicable, il convient de distinguer si l'agent de la vente est uniquement commissionnaire ou s'il est à la fois commissionnaire et acheteur-vendeur de produits hors-presse (exemple : librairie ou papeterie).

4. Le régime de la TVA des commissions perçues par les agents de la vente. La presse bénéficie d'un “régime dérogatoire” qui permet à l'éditeur d'acquitter la TVA sur le prix de vente au public. Depuis le 1er janvier 1989, un taux unique de TVA, fixé à 2,10 %, s'applique à toutes les formes de presse.
Toutefois, certains produits considérés comme hors-presse, au plan fiscal, ont un taux plus élevé : les encyclopédies, par exemple, sont taxées à 5,5 % (pour les fascicules seulement, la vente de plus-produits se traduisant par un taux moyen de TVA négocié entre l'éditeur et l'administration fiscale), les catalogues à 20,6 %, etc.
Si les commissions perçues par les commissionniares– diffuseurs et dépositaires – sont juridiquement taxables, ces derniers sont toutefois dispensés de calculer, de déclarer et d'acquitter la TVA, à la condition sine qua non qu'ils justifient de leur qualité de commissionnaire en étant inscrits au Conseil supérieur des messageries de presse.

5. La demande d'inscription au Conseil supérieur des messageries de presse doit être présentée dès le début de l'activité commerciale de l'agent de la vente, qu'il s'agisse d'une mutation ou d'une nouvelle installation, même si le nouveau titulaire succède à un membre de sa famille (fils prenant la succession de son père, par exemple).

6. Les droits à déduction des agents de la vente de la presse en matière de TVA. Puisque les commissions sont réputées taxables (la TVA étant en fait acquittée par l'éditeur dans sa globalité), les agents de la vente conservent le droit à déduction de la TVA qui a frappé leurs achats.

7. Facturation des exemplaires vendus par les agents de la vente. Bien que les agents de la vente ne soient pas propriétaires des titres qu'ils ont reçu mandat de mettre en vente, ils sont en droit de délivrer une facture à tout acheteur de journaux et publications qui en fait la demande, facture sur laquelle ils doivent faire apparaître le prix public, le taux et le montant de la TVA applicable au titre.

8. Frais de livraison. Il est fréquent que les dépositaires assurent la livraison des fournitures aux points de vente des diffuseurs qu'ils approvisionnent. Il est admis que le transport ainsi assuré ne fasse pas l'objet d'une facturation, et que le service rendu soit directement imputé, avec d'autres éléments également susceptibles d'intervenir, dans la fixation des taux de commission servis aux diffuseurs.
En outre, les dépositaires centraux et leurs commissinnaires sont dispensés du paiement de la taxe pour ces opérations de transport.

9. Déclaration des commissions reversées. Tout agent de la vente est tenu, au début de chaque année, de déclarer les commissions reversées à d'autres commissionnaires (crieurs, vendeurs-colporteurs, porteurs, etc.).